Hypothèse sur la datation du tympan

En l'absence de source, la date de création du tympan demeure une énigme pour les historiens. La vision communément admise penche pour une datation haute au début du XIIe siècle (1120-1140, souvent plus tôt encore aux alentours de 1100, voire 1097). (1)
Nous formulons une hypothèse radicalement différente : la réalisation du tympan en trois étapes, avec une conception précoce, une réalisation en deux temps avec un achèvement et un montage mouvementés.

  1. UNE CONCEPTION PRÉCOCE

Le tympan a très probablement été conçu à l'extrême fin du XIe s. ou au tout début du XIIe, à l’époque du vénérable abbé Bégon III (1087 – 1107), et probablement par l’abbé lui-même, alors qu'il est possible qu'il n'ait pas été prévu dans le projet architectural initial.
Bégon en imagine le thème et la composition. Replaçons-nous dans le contexte, dans l’euphorie suscitée par les succès de la première croisade. La prise de Jérusalem en 1099 est pour les contemporains l’annonce imminente de la fin des temps. Bégon choisit donc le thème de la Parousie pour le portail occidental de l’abbaye qui n’est pas encore achevée. Il imagine le triomphe impérial du Christ à son retour sur terre pour juger les vivants et les morts. En ce sens, il imagine un Jugement dernier, avec un enfer et un paradis les signes apocalyptiques et les versets de saint Matthieu. Ainsi, le message de cet "arc de triomphe" pose clairement la question du Salut. Bégon opte également pour la structure du tympan, calquée sur le plan d’une maison (la cité de Dieu) suivant les procédés mnémotechniques recommandés par la scolastique monacale.

Sur cette trame, quelques éléments du tympan sont sculptés aux alentours de 1120 sous l’abbatiat de Boniface (1108 - 1125), successeur de Bégon : par exemple, les cinq premiers personnages de la marche de l’église vers le Salut, à l'extrémité nord du registre médian : sur ce bloc de pierre sont alignés, sous un ange qui porte une couronne, quatre saints emblématiques des premiers temps du christianisme : Marie de Magdala, apôtre des apôtres ; sainte Foy, martyre et prêtre ; l’anachorète saint Antoine ; enfin un Père de l’Eglise, saint Jérôme. Tous quatre sont nettement de plus petite taille que les autres personnages du registre médian, ce qui implique un décrochement du titulus surélevé par rapport au reste du registre. Les vêtements présente un style très différent (la base des drapés n'est pas ici festonnée de multiples replis), les proportions des oreilles sont plus modestes et la forme des lèvres diffère sensiblement du reste de l'ouvrage.

Marie de Magdala, apôtre ;  sainte Foy, martyre ;  saint Antoine, anachorète ;   saint Jérôme, père de l'église

La sculpture et l'assemblage des 24 blocs du tympan ont probablement exigé plusieurs décennies de travail au cours desquelles la réponse à la question du salut va progressivement évoluer et s'affiner notamment à la lumière des travaux des théologiens contemporains, notamment Hugues de Saint-Victor, avec le concept de la restauration des âmes, précurseur de la notion de purgatoire, et l'accent mis sur les voies du salut par la Grâce et par la foi. Les similitudes avec le portail des Orfèvres de saint-Jacques de Compostelle laissent penser que le même artiste a pu travailler, dans un ordre qui reste discuté, sur les deux chantiers.

Mais bientôt les travaux ont pu être brutalement interrompus aux alentours de 1125 où l’abbaye traverse une crise profonde : il n’y a plus d’abbé pendant trente ans après Boniface. Une lacune s'ouvre dans les archives. Concomitamment, l’édification du tympan tombe au pire moment, à l'époque de l’émergence de la réforme cistercienne qui bouleverse l’ordre bénédictin et les normes de l'esthétique et de l'architecture religieuse. Entre 1120 et 1125, Bernard de Clairvaux rédige son Apologie à Guillaume de Saint-Thierry (2) dans laquelle il définit et impose ses vues en matière d’architecture.  Les images, la statuaire sont bannies des nouvelles abbayes. La vénération pour les reliques et surtout l'or des reliquaires sont honnis. Conques, aux antipodes de cette esthétique iconophobe, semble à contre temps et est impuissante face au succès fulgurant du courant cistercien. En terre rouergate, elle se voit rapidement concurrencée par six nouvelles abbayes cisterciennes fondées en une quarantaine d’années : Loc Dieu (1123), Silvanès (1132), Beaulieu (1144), Nonenque (1146), Bonneval (1147),  Bonnecombe (1167). Conques qui vit de l’attraction de ses reliques enchâssées dans de somptueux reliquaires est directement dans le collimateur du redoutable saint Bernard, au point que la poursuite de l’édification du tympan historié est probablement remise en cause.

2. UNE RÉALISATION DIFFÉRÉE ?

Cette interruption plausible sinon probable pourrait être mise en relation avec la modification du parti architectural détectable par un certain nombre d'indices (3) et  avec le changement constaté dans le style de taille des pierres visible sur la façade occidentale mais aussi à l'intérieur de la nef (4). La crise est rude mais passagère : trois décennies après Boniface, l’abbaye retrouve enfin un abbé en 1154 (l’année suivant la mort de Bernard de Clairvaux), en la personne d’Odon. Les travaux pourraient n'avoir repris qu’une décennie plus tard, après 1165.
Les scènes représentées au tympan ont nécessairement évolué depuis le projet initial de la fin du XIe ou tout début du XIIe s. Ainsi des éléments d’actualité sont introduits, tels que, par exemple, la représentation de l'arbalète, arme jugée déloyale et frappée d'anathème au deuxième concile du Latran en 1140, disposition renforcée en 1143 par le pape Innocent II qui frappe d'excommunication les arbalétriers et les fabricants de cette arme. De quoi expliquer sa présence au Tartare des Vivants.
La présence de Charlemagne aux côtés des élus est un autre indice en faveur d’une datation basse. Charlemagne est béatifié en 1165, ce qui justifierait plus aisément sa présence au paradis. Cette canonisation (ou béatification, ce qui est strictement équivalent à l’époque) est le fait de Pascal III, à l’instigation de l’empereur germanique Frédéric 1er Barberousse. (5) Admettons que si le tympan a été sculpté avant, il aurait pressenti le mouvement de l'Eglise en sa faveur, ce qui ne ferait que renforcer son caractère visionnaire.
Notons au passage que les travaux de restitution de la polychromie originelle menés par les Monuments Historiques, fondés sur l’analyse des prélèvements des traces de pigment, révèlent que l’empereur était vêtu d’un manteau bleu et non pas pourpre comme l’aurait voulu l’usage de l’époque carolingienne. Mais la « révolution bleue » chère à Michel Pastoureau l’autorise à se vêtir d’un manteau d’azur. (6)

Parallèlement, sur le plan théologique, on peut déceler dans certains détails du tympan, une évolution dans la représentation des acteurs du Salut, conforme à l’évolution de la théologie victorine au cours du XIIe s. La Grâce n’est plus uniquement attribuée au pouvoir du Père et du Fils, comme dans la pensée de Hugues de Saint-Victor (1096-1141) au début du XIIe, mais elle se manifeste aussi grâce à un nouveau venu, l’Esprit Saint, comme le souligne le disciple de Hugues, Richard de Saint-Victor (1110-1173). Le Saint-Esprit est ici représenté sous forme d’ondes, comme dans les dessins des visions d’Hildegarde de Bingen (1098-1179).

Nous avons déjà signalé les similitudes entre les scènes représentées au tympan et le quarante-deuxième sermon attribué à saint Bernard (7) qui décrit dans la troisième contrée les « trois endroits destinés aux âmes des morts, selon leurs différents mérites, l’enfer, le purgatoire et le ciel ». (lire l'extrait dans la note 8)
Il est difficile de savoir si le tympan est antérieur à ce sermon, et dans ce cas absolument visionnaire et prémonitoire, ou bien s’il ne fait que refléter une doctrine déjà bien ancrée dans les esprits en matière de Salut. On pourrait même y voir alors une illustration littérale du sermon, comme un hommage, plus qu’une concession, au maître de Clairvaux, mort en 1153. Si l’on retient l’hypothèse d’une érection du tympan postérieure à 1165, disons au cours de la décennie de 1170, le tympan de Conques serait contemporain de l’apparition du substantif « purgatoire » signalée par Le Goff, dans le Purgatoire de saint Patrick de Henri de Saltrey. (9) Le geste de la Vierge Marie intercédant pour le salut des morts prendrait ici tout son sens.

D’autre part, sans aller jusqu’à avancer une datation aussi tardive, certains historiens, dont Marcel Deyres, ont relevé sur certains détails graphiques les marques d’un style roman tardif (mouluration des colonnettes des arcades du paradis agrémentées de tores, fleurons à pétales recourbés des pentures de la porte du paradis...) (10)
On perçoit dans certains détails de ce haut-relief, comme le visage du Christ par exemple, un trait de style pré-gothique, tout comme la facture très fine de la statuaire plus proche d'une sculpture en ronde-bosse que de la gravure d'un bas-relief.

Par gageure, poussons hardiment le bouchon plus loin, en imaginant, par le jeu de la polysémie, comme une sorte de « mémoire du futur » une interprétation dans l’hypothèse (non vérifiée) d’une réalisation postérieure au traité de paix de Venise, signé en 1177 entre le pape et l'empereur romain germanique qui met fin au schisme, actant la soumission de Frédéric Barberousse. Ce dernier  révoque son antipape Calixte III et reconnaît Alexandre III comme pape légitime. Le tympan de Conques, imaginé au début du siècle, comme l’arc de triomphe annonçant la parousie imminente après la conquête de Jérusalem,  resterait toujours quelques 70 ans plus tard, un arc triomphal de l'Église célébrant sa victoire (définitive ?) et proclamant sa suprématie sur le pouvoir politique.
Les quatre ecclésiastiques dont la position juste au-dessus de l'empereur Henri V les dénoncerait comme des antipapes, pourraient alors être assimilés, a posteriori, aux quatre antipapes du parti de l'empereur Frédéric Barberousse, à savoir Victor IV, Pascal III, Calixte III et Innocent III, qui se sont succédés de 1159 à 1180 lors du schisme provoqué par Frédéric Barberousse. Cette boutade sert à signifier que le décodage des scènes du tympan prend sens à toutes les époques, pour la bonne raison que ce tympan traite de problèmes universels et permanents. C'est incontestable et toujours d'actualité. Une interprétation fidèle à l'esprit d'origine fonctionne donc même avec des extrapolations audacieuses, aussi anachroniques que celle-ci.

De fait, une datation tardive bouleverserait le cours de l’Histoire de l’art. On a souligné les similitudes entre le tympan de Conques et celui du portail central de la façade occidentale de Saint-Denis et on admet que Conques a inspiré le second. Mais serait-il possible que ce soit l'inverse dans l'hypothèse d'une datation tardive ? Alors que dans le bassin parisien se mettent en place les prémices de l'art gothique, Conques, l'occitane, porte l'accomplissement de l'art roman à sa perfection.

le jugement dernier de Saint-Denis
le Jugement dernier de Saint-Denis (NB le Christ étend les bras comme à Beaulieu réalisé en 1135)

3. A LA RECHERCHE DU TRUMEAU MANQUANT

Venons-en à la troisième étape de l’érection du tympan, avec la question de son assemblage, notamment celle de ses soubassements, les piédroits et le trumeau central aujourd'hui remplacés par une maçonnerie.
L’hypothèse suggérée par l’abbé Rascol est séduisante : le bloc de l’Annonciation enchâssé dans le mur nord du croisillon septentrional aurait été le trumeau primitif, tandis que les statues de saint Jean-baptiste et d'Isaïe constituait les piédroits. Pourtant certaines contraintes ont permis à Marcel Deyres de remettre en cause cette théorie.  Les piédroits auraient-ils été supprimés et remplacés par un lourd parement maçonné lors du déplacement du tympan dès l’époque romane (ou peu après ?), pour le renfoncer de plusieurs dizaines de centimètres afin de le mettre à l’abri des intempéries ? (11) Serait-ce à cette époque que les anges "Curieux" de l'archivolte ont été sculptés ? Certaines moulures du gâble semblent de style gothique.
Plus tard et jusque vers 1880, une statue de sainte Foy du XVe s. était placée sur le trumeau. (Cf. infra gravure circa 1820) Elle fut ensuite supprimée par Jean camille Formigé, l'architecte chargé de la restauration de l'abbatiale, qui jugeait la cohabitation des styles romans et gothiques hérétique.
L'énigme du trumeau originel reste entière. (Cf. chapitre 7)

L'abbatiale vers 1830 Cliquez pour agrandir le Calice

L'abbatiale vers 1820

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(1) La datation du tympan de Conques reste indéterminée et « varie d'un auteur à l'autre, même si une majorité s'accorde pour le placer sous l'abbatiat de Boniface, entre 1107 et 1125. » Jean-Claude Fau, Conservateur des Trésors de Conques, in "Enfer et Paradis", Cahiers de Conques n°1, Centre Européen d’Art et de Civilisation Médiévale, 1995, p. 76. Lei Huang le situe aux alentours de 1100. Il rappelle, que les indices qui permettent de penser que le maître du tympan de Conques est également l'auteur du tympan de la porte des Orfèvres de Saint-Jacques-de-Compostelle : « Nombreux sont les auteurs à avoir établi des rapprochements, entre la sculpture de Conques et celle de Compostelle », ce qui plaide pour une datation haute. Marcel Deyres penche en revanche pour une datation vers 1130-1135 et avec un achèvement vers 1140-1145. Il remarque plusieurs détails qui révèlent un style roman tardif (mouluration des colonnettes des arcades du paradis agrémentées de tores, fleurons à pétales recourbés des pentures de la porte du paradis...). D'autres historiens situent la construction du portail vers 1130 - 1135. L’archiviste, conservateur Alain Erlande-Brandenburg rappelle « qu'avant les années 1120-1140, l'espace situé en avant du portail était un cimetière, avec une fontaine au nord et que le portail n'existait donc pas antérieurement ». (Compte rendu de la séance du 28/11/2007 de la Société Nationale des Antiquaires de France p. 244. Voir le document sur Persée) Marcel Durliat le date également de 1140, Don Denny, de l'université du Maryland, opte pour une date très proche de 1150, tout comme Marcello Angheben.  Jacques Bousquet, en 1995, dans son article Enfer et paradis au tympan de Conques  publié dans les Cahiers de Conques, concluait que le tympan « ne pouvait être que d'après 1150, tout comme la doctrine du purgatoire. Selon [lui], il n'y a aucune contrainte iconographique, pas plus qu'historique, pour aller dans ce sens. » Yves Christe, comme Jean  Hubert le datent entre 1160 et 1170, ce qui nous paraît tout à fait plausible. (Cf. Yves Christe, La vision de Matthieu (Matth. XXIV-XXV): origines et développement d'une image de la Seconde Parousie, Klincksieck, 1973, p. 40 : «  Ce même schéma (croix au-dessus du Christ) se retrouve au tympan de Conqques, œuvre romane relativement tardive, qu’avec M. J. HUBERT je ne crois pas antérieue à 1160-1170 ». Chacun apporte des arguments à sa thèse, mais il n'y a pas consensus. On pourra se reporter aux principaux ouvrages :

- Paul Deschamps, Etude sur les sculptures de Sainte-Foy de Conques et de Saint-Sernin de Toulouse et leurs relations avec celles de Saint-Isidore de Léon et de Saint-Jacques-de-Compostelle, dans Bulletin Monumental, 1941, p. 239-264 (Consultable sur Persée)
- Christoph Bernoulli, Die Skulpturen der Abtei Conques-en-Rouergue, Bâle, 1956
- Marcel Deyres, Le portail occidental de Sainte-Foy de Conques, in Bulletin de la Société Nationale des Antiquaires de France, 1969-1971, Séance du 4 juin 1969, p. 194-202. (Texte en ligne)
- Jacques Bousquet, La sculpture à Conques aux XIe et XIIe siècles, Lille, 1973, t. 2, p. 573-595 ;
- Jacques Bousquet, "Enfer et paradis au tympan de Conques Réflexions complémentaires", in  Enfer et paradis, L'au-delà dans l'art et la littérature en Europe, Les cahiers de Conques, n° 1,  mars 1995 pp. 53-65
- Don Denny, The Date of the Conques Last Judgment and Its Compositional Analogues, in Art Bulletin, Vol. 66, N° 1, mars 1984, pp. 7-14
- Marcel Durliat, La sculpture romane de la route de Saint-Jacques : de Conques à Compostelle, Mont-de-Marsan, 1990, p. 350. »
- Marcello Angheben, D'un jugement à l'autre, La représentation du jugement immédiat dans les Jugements derniers français: 1100-1250, Brepols, Turnhout, 2013, p. 187-188
- Lei Huang, Le Maître du tympan de l'abbatiale Sainte-Foy de Conques : état de la question et perspectives, Etudes Aveyronnaises, Recueil des travaux de la Société des lettres, sciences et arts de l'Aveyron, 2014, p. 87-100.
- Lei Huang, L'abbatiale Sainte-Foy de Conques (XIe - XIIe siècles), thèse de doctorat d'histoire de l'art et d'archéologie du Moyen-Âge, Paris I Panthéon Sorbonne, 2018, 439 p. (accessible en ligne).

Pour notre part, nous suggérons une hypothèse : le tympan pourrait avoir été commandé et son canevas conçu à l'époque de Bégon III (1087-1107), mais sa confection aurait pu prendre beaucoup de retard, et n'être achevé que plusieurs décennies plus tard, dans la seconde moitié du XIIe s., comme semblerait le suggérer une facture dans un style pré-gothique. C'est précisément à cette époque que l'on constate dans toutes les archives une lacune dans la succession des abbés entre 1125 (à la fin de l'abbatiat de Boniface, successeur de Bégon III) et 1154 (début de l'abbatiat d'Odon). Cette interruption longue de trente ans serait-elle révélatrice d'une profonde crise interne à l'abbaye qui perd en outre de nombreuses possessions, et serait-elle en partie responsable d'un retard pris dans l'exécution du tympan ? Est elle corrélée à l'expansion cistercienne qui voit la fondation de 6 nouvelles abbayes en Rouergue entre 1123 et 1167 (Loc Dieu, Silvanès, Beaulieu, Nonenque, Bonneval et Bonnecombe) ? Certains détails (Charlemagne au Paradis, le quarteron d'antipapes) pourraient même plaider pour une datation basse, contemporaine de l'époque de Frédéric Barberousse, entre 1165 et 1190. (Remonter au texte)

(2) Lire le texte (notamment le chapitre XII) sur le site de la Bibliothèque monastique Saint Benoît. (Remonter au texte)

(3) Ce changement du projet architectonique a été subodoré par la découverte de vestiges d'un massif de maçonnerie (fondations servant de soubassement destiné à supporter de lourdes charges) lors des travaux de restauration menés par Jean Camille Formigé vers 1875. Lei Huang en fait état dans sa communication "Pour une histoire de la restauration et de la conservation : un autre regard sur le portail occidental de Sainte-Foy de Conques", publié dans les Actes du colloque international des 25-26 novembre 2014 consacré aux "Portails en 3D. Le relevé laser au service du patrimoine", p. 41.  (Télécharger l'article) (Remonter au texte)

(4) Voir à ce sujet les pages 93 et 94 des Actes du 167e Congrès archéologique de France, 2009, les communications d'Eliane Vergnolle, Henri Pradalier et Nelly Pousthomis-Dalle, “Conques, Sainte-Foy : l’abbatiale romane” (2011). (Remonter au texte)

(5) Même si la sanctification de Charlemagne fut contestée car prononcée par un antipape (Pascal III), cette canonisation ne fut jamais infirmée, l’Eglise romaine se contentant depuis d’employer pudiquement le terme de « bienheureux ».
Par ailleurs, la représentation de Charlemagne au paradis revêt un sens évidemment politique qu’éclairent les bonnes relations de Conques avec le Saint-Empire romain germanique et qui lui ont valu l’octroi de prieurés dédiés à sainte Foy à Sélestat, Saint-Gall et Bamberg. Ces liens remontent à l’époque de Bégon III récompensé pour avoir reçu « fastueusement » le comte de Lorraine, Conrad Ier de Hohenstaufen, venu en pèlerinage pénitentiel à Conques, et lui prédire, à lui ou à ses descendants, la couronne impériale. La prophétie se réalisera en 1138, lorsque Conrad III sera élu Roi des Romains, auquel succèdera en 1152 son neveu, Frédéric Barberousse, premier empereur de la dynastie des Hohenstaufen. (Remonter au texte)

(6) Cf. Michel Pastoureau, Bleu, Histoire d'une couleur, Points Histoire, 2000.  Voir la vidéo (Remonter au texte)

(7)  J. Le Goff dans un article consacré à "La naissance du Purgatoire (XII-XIIIe siècle)" émet des doutes sur la paternité attribuée à saint Bernard de ce célèbre sermon. (Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public, 1975, 6, pp. 7-10. Voir texte en ligne) Mais le fait qu’il ait été rédigé plus tard par un autre n’enlève rien, bien au contraire, ni à la prémonition anticipatrice et révolutionnaire du tympan si elle est antérieure au texte, ni à la confirmation d’une érection tardive du tympan dans le cas inverse. (Remonter au texte)

(8) « 5. La troisième contrée est celle de l'expiation. Il y a trois endroits destinés aux âmes des morts, selon leurs différents mérites, l'enfer, le purgatoire et le ciel. L'enfer est pour les âmes impies, le purgatoire pour celles qui doivent se purifier, et le ciel pour celles qui sont parfaites. Ceux qui sont en enfer ne peuvent plus être rachetés, attendu que dans l'enfer il n'y a plus de rédemption. Ceux qui vont dans le purgatoire attendent leur rédemption, mais auparavant ils doivent souffrir les ardeurs du feu, ou les rigueurs du froid, ou l’aiguillon de quelque autre douleur. Ceux qui sont dans le ciel goûtent une joie complète dans la vision de Dieu, ils sont les frères du Christ, selon la nature, ses cohéritiers dans la gloire, et lui ressemblent dans l'heureuse nécessité. Mais puisque, de même que les premiers ne méritent plus d'être rachetés, les derniers n'ont plus besoin de l'être, il ne nous reste que les seconds, chez qui nous devions nous rendre par un sentiment de compassion, car ils nous ont été unis par leur humanité. J'irai donc dans cette contrée, et je verrai ce grand spectacle, je verrai comment un Père plein de bonté abandonne les enfants qu'il doit glorifier ensuite, aux mains du tentateur, non pour que celui-ci les tue, mais pour qu'il les purifie ; non pour encourir sa colère, mais pour obtenir sa miséricorde ; non pour leur destruction, mais pour leur instruction ; pour que, cessant d'être des vases de colère destinés à être rompus, ils deviennent des vases de miséricorde préparés pour le royaume. Je me lèverai donc pour leur venir en aide, je pousserai pour eux des gémissements, j'implorerai le Seigneur par mes soupirs, j'intercéderai par mes prières,[…] C'est par ces sortes de devoirs, et par d'autres semblables que nous pouvons couper court à leur pénitence, terminer leurs fatigues, et anéantir leurs peines » Saint Bernard,  sermons divers, XLII. Les cinq contrées, 5. (Lire le texte intégral) (Remonter au texte)

(9) Il s'agit du Purgatoire de saint Patrick. (Tractatus de Purgatorio Sanctii Patricii, Henry of Saltrey,   ̴ 1170) (Remonter au texte)

(10) Marcel Deyres, Le portail occidental de Sainte-Foy de Conques, in Bulletin de la Société Nationale des Antiquaires de France, 1969-1971, Séance du 4 juin 1969, p. 194-202. (Texte en ligne). (Remonter au texte)

(11) Plusieurs hypothèses ont été avancées  et abandonnées sur ce déplacement : voir les travaux de l’abbé Louis Bousquet ("L'énigme architectonique du Portail de Conques", in Revue du Rouergue n° 4, 1947) ; de l’abbé Marcel Rascol ("Le portail de Sainte-Foy de Conques", in Bulletin de la Société Archéologique du Midi de la France, Privat, 1942-1945, Toulouse, 1947, p. 452 sq.) ; de Louis Balsan  (“Le déplacement du tympan de l'abbatiale de Conques”, in Procès-verbaux des séances de la Société des Lettres, Sciences et Arts de l'Aveyron, tome XLIV, 1984 (Texte en ligne) ; la note rédigée par Louis Balsan et Dom Angelico Surchamp dans Rouergue roman, Zodiaque, La Pierre-Qui-Vire, 1963, p. 29-34. ; et de Marcel Deyes ("Le portail occidental de Sainte-Foy de Conques", in Bulletin de la Société nationale des Antiquaires, 1969-1971, 4/06/1969)... On trouvera dans Les Cahiers de Conques, n° 1, mars 1995, "Enfer et Paradis : l’au-delà dans l’art et la littérature en Europe", p. 79-92, l’étude critique du déplacement du tympan et de son inachèvement, sous la plume autorisée de Louis Causse, architecte des Bâtiments de France, Directeur du Service Départemental de l'Architecture et du Patrimoine. Enfin, une synthèse a été établie récemment par Lei Huang qui a étudié minutieusement les techniques de taille des pierres. Lei Huang, L'abbatiale Sainte-Foy de Conques (XIe - XIIe siècles), Thèse de doctorat en histoire de l'art et archéologie du Moyen-Âge, Université Paris I Panthéon Sorbone, Vol. 1 (textes), 2018, (pages  272 à 279). (Lire et télécharger sa thèse). De ses conclusions il ressort qu'il est difficile de déterminer la date de la mise en place du tympan (qu'il situe entre les 6e et 7e phases de la construction de la basilique qu'il a pu distinguer) mais qu'il est possible que se soit  assez longtemps après sa réalisation (cf.HUANG L. 2018 p. 278). Enfin, la structure du tympan (constitué de 24 blocs) n'interdit pas un démontage et remontage dès l'époque romane. (Remonter au texte)

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