Le temps de l'espérance née de la première croisade

L'actuelle abbaye de Conques a été construite peu de temps après un événement historique dont on mesure mal de nos jours l'impact psychologique.
Novembre 1095 : Urbain II prêche la croisade à Clermont.
En juillet 1099, à peine trois ans et demi plus tard, les Croisés prennent Jérusalem. La nouvelle soulève alors dans l'ensemble de l'occident chrétien une immense vague d'espérance et prend la valeur d'un signe révélateur d'une Parousie imminente.


Un reliquaire exposé au très riche trésor ecclésiastique de Conques acte cet événement. Daté de 1100, identifié par les inscriptions "PASCALIS II PAPA", " SIT RELIQVAS DE CRVX XPI ET SEPVLCRO"(1) , il contient, selon la tradition, un fragment de la Vraie Croix et un morceau du Tombeau du Christ, tout juste rapportés de Terra Sainte.
En même temps, Pascal II accorde à Conques un privilège exorbitant du droit commun, à savoir l'obtention d'une bulle élevant sainte Foy au rang d'apôtre dans le canon de la messe !
Ce qui a pour conséquence d'attribuer au pèlerinage à Conques l'équivalence de ceux de Saint-Jacques-de-Compostelle, de Rome ou de Jérusalem.
Et donc l'indulgence plénière qui accorde la rémission des péchés. Cette commodité contribuera sérieusement à la notoriété et au succès des pèlerinages à la basilique Sainte-Foy de Conques.
On notera la présence, sous les pieds de saint Jean, d'une corbeille de pains, et sous ceux de la mère du Christ, d'un calice (ou d'un ciboire). Avec cette représentation manifeste de l'Eucharistie, nous trouvons ici, d'après Darcel, Inspecteur Général des Monuments Historiques, la première représentation du Saint Graal. (2)

C'est alors l'apogée du retentissement de Conques, sous la direction de son abbé Bégon III (1087 - 1107).

Le tympan sera, selon nous édifié plus tard, probablement durant le dernier tiers du XIIe siècle.

Lien entre le tympan et les reliques
Une même perspective eschatologique anime à la fois les reliquaires du trésor ecclésiastique de Conques et les sculptures de son tympan. Conques possède dans le reliquaire dit Lanterne de Bégon des reliques d'Habacuc et de Daniel, deux prophètes qui symbolisent la foi et la résurrection. Les visions apocalyptiques de Daniel sont proches des scènes représentées au tympan : "Tous ceux qui se trouveront inscrits dans le Livre [de Vie seront sauvés]. Un grand nombre de ceux qui dorment au pays de la poussière s'éveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour l'opprobre, pour l'horreur éternelle" (Dn 12 : 1-2). Signalons au passage que Daniel emploie l'expression "Fils de l'Homme" (ben Adam en hébreux ou bar Nasha en araméen) pour évoquer le Messie, expression que Jésus reprendra pour se désigner(3).
Enfin, à l'instar du tympan, la scène de la crucifixion est encadrée, sur le reliquaire de Pascal II, par les astres du jour et de la nuit.

Voir aussi la page conscrée aux reliques de sainte Foy

Le Saint Graal
La plus ancienne représentation du Saint Graal (détail du reliquaire du pape Pascal II) (4)

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Reliquaire de Pascal

Reliquaire de Pascal Il, Trésor Ecclésiastique de Conques : sous les pieds de Marie, le calice représente le Saint Graal. Comme au tympan, la croix du Christ est encadrée par le Soleil et la Lune. (Survolez l'image pour afficher les légendes et la traduction du vers léonin) le Calice, première représentation du Saint Graal la corbeille de pain


(1) Ce reliquaire a été offert en 1100 à l'abbé Bégon III par le pape Pascal II qui avait succédé à Urbain II en août 1099. (remonter)
(2) Darcel, Alfred, Le trésor de Conques, Annales archéologiques de Didran, Paris. (remonter)

(3) Voir à ce sujet ce que Daniel Boyarim écrit sur le Fils de l'Homme dans son essai sur "Le Christ Juif", Coll. Religions Lexio, Cerf, 2019. (remonter)
(4) Cette représentation du Saint Calice devance de huit décennies celle du pied de croix de Saint-Bertin conservé au musée Sandelin et daté d'environ 1180 (musée des Beaux-Arts de Saint-Omer) (remonter)

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