SAINTE FOY
Sainte Foy occupe une place de choix au tympan. Conques, à qui la basilique est dédiée dès 883, lui doit beaucoup. Le culte, le pèlerinage et la dévotion populaire portée aux reliques de la fillette martyre ont joué un rôle essentiel dans la notoriété et la richesse de Conques, plusieurs siècles avant même l'érection du tympan, et même bien avant que ne se développe le pèlerinage vers Saint-jacques-de-Compostelle par la via podiensis qui passe à Conques. LA FOI SAUVE : c'est le message et le symbole de Foy, enfant martyrisée pour sa foi. C'est aussi bien sûr le leitmotiv du tympan. La basilique Sainte-Foy de Conques, donc dédiée à sainte Foy, ne pouvait pas tenir un autre discours dans son arc triomphal qui aborde la question du Salut. Ce précepte trouve sa source dans les Écritures qui associent le Salut à la foi : “Va, ta foi t'a sauvé” (Mc 10 : 52 ou Lc 7 : 50) et “Vous obtiendrez le salut de vos âmes pour prix de votre foi”, (1 Pi 1 : 9). C'est pourquoi sainte Foy figure deux fois au tympan. D'abord parmi les saints de l'Eglise primitive et mais aussi et surtout dans l'écoinçon qui lui est entièrement consacré. Nous avons analysé en détail ce segment essentiel du tympan pour dévoiler sa symbolique et décoder ses multiples sens sur une page dédiée. Nous aborderons ici les aspects complémentaires concernant sainte Foy, notamment son couronnement céleste et son culte spécifique. Nous conclurons par une brève biographie. |
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![]() Couronnement céleste de sainte Foy : l'ange porte au ciel la couronne (détail du tympan) Cliquez ici pour afficher un zoom |
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Une autre scène de la frise des élus du christianisme rend hommage à sainte Foy. C'est celui de
son couronnement, car à l'instar de la Vierge
Marie, sainte Foy a reçu un couronnement céleste.
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SAINTE FOY APÔTRE Le culte de sainte Foy, étroitement associé à celui de Marie de Magdala, occupe un rôle fondamental à l'abbatiale
de Conques qui lui est dédiée, au même titre qu'au
Saint Sauveur et qu'à saint Pierre. Une bulle du pape Pascal II de 1100, lui accorde carrément le rang d'apôtre. |
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UN CULTE POPULAIRE Sainte Foy représente la conception miséricordieuse du Salut comme l'atteste l’anecdote relatée dans le Livre des Miracles de sainte Foy rédigé par Bernard d’Angers vers 1010 : ce docte écolâtre se disait outré par la coutume populaire et profane qui mêlait au pieux office des veilles, des « lais champêtres, (…) des cris aigus et sauvages, (…) des complaintes ineptes et futiles et d’autres frivolités (…) absurdes et intolérables ». Pour faire cesser ces pratiques vulgaires jugées incongrues, les moines iront jusqu’à clore les portes de l’abbaye aux indésirables. C’est alors qu’intervient la facétieuse fillette, en faveur des bruyants fidèles écartés : elle leur ouvre miraculeusement les portes ! Touchée par la ferveur des humbles, elle répond favorablement aux suppliques des pèlerins bannis. Faisant alors, comme à l'accoutumée, retour sur lui-même, Bernard d’Angers tire de l’intervention de la sainte une leçon de théologie sur le caractère miséricordieux du Salut : « Dieu tolère ces pratiques et les agrée pour l’intention religieuse qui les inspire et par condescendance. Dieu est un père compatissant, plein de pitié pour la faiblesse de ses enfants ; il connaît la fragilité de leur nature ; loin de rechercher dans l’homme ce qui peut le condamner, il s’efforce de découvrir dans le cœur du pécheur la racine du salut. » (Livre premier des miracles de sainte Foy, chapitre XII). Cette histoire souligne que la relation entre la Foi est le Salut est essentielle dans la théologie monastique romane et permet de mieux comprendre la présence de pécheurs notoires dans les Demeures angéliques*. (2) |
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- La prosternation (proskynèse) de sainte Foy se repliant sur elle-même devant la main de Dieu, traduit la concentration de l’être devant le Jugement. C'est une manifestation implicite de la conscience de soi qui émerge au XIIe s. | |
![]() L'autel, le calice et le trône vide : trois symboles du sacerdoce de sainte Foy (en savoir plus sur sa prêtrise). Survolez l'image pour afficher les légendes |
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LES GRILLES DU CHŒUR
Les chaînes des prisonniers libérés ont servi raconte la légende à
forger les grilles du chœur et sont toujours visibles de nos
jours. Le rappel de la libération des captifs n'est pas anodin
dans la problématique du Salut : en effet,
le purgatoire n'est-il pas en somme une histoire de libération
?
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Cette fillette martyre d’une douzaine d’années, née vers 291 dans une famille gallo-romaine aisée, fut condamnée et exécutée, brûlée vive et décapité à Agen le 6 octobre 303 (selon la tradition) par le tribunal du proconsul romain Dacien, pour avoir refusé de renier sa foi. Cela se passait à l’époque des grandes persécutions provoquées par les édits de Dioclétien en 303. Quelques jours plus tard, le premier évêque d’Agen, saint Caprais devait être lui aussi martyrisé. En 866, un moine de Conques, ariviscus (Aronisde) vole les reliques de la sainte et les amène à Conques. Cette translation furtive ne sera pas dénoncée par les moines d’Agen, et assurera la prospérité de Conques où la sainte multiplie les miracles. Au début du XIe s. Bernard d’Angers rédige le Liber Miraculorum Sancta Fidis, prototype des livres des miracles hagiographiques. Les « facéties » de sainte Foy, fillette espiègle deviennent célèbres. Elle acquiert la réputation de libérer les captifs. Pour ce faire, elle bénéficie du concours financier des moines qui reçoivent de nombreuses offrandes versées par les innombrables pèlerins, attirés par sa renommée et par les remarquables reliquaires qui assurent encore aujourd’hui la notoriété du trésor de Conques. Vers 1060, la Cançon de Santa Fe est la première chanson de geste, rédigée en langue d’oc. Elle est probablement antérieure à la première chanson de geste de langue d’oil. |
![]() Sainte Foy avec son gril et sa palme (enluminure du XIIe s. Sölden, Bade-Wurtemberg) |
(1) L'enfeu de Bégon est encastré dans le mur extérieur sud de l'abbatiale, du côté du cloître. (Remonter au texte)
(2) Les Écritures associent le Salut à la foi : “Va, ta foi t'a sauvé” (Mc 10 : 52 ou Lc 7 : 50) et “Vous obtiendrez le salut de vos âmes pour prix de votre foi”, (1 Pi 1 : 9). (Remonter au texte)